mercredi 16 janvier 2013

PMC : petit mais costaud ?


Cela fait maintenant un an et demi que mon petit couple de Focal s'est trouvé une nouvelle grande soeur en la personne des PMC TB2A-SII suite à une bonne affaire. Autant dire que par rapport à mes vieilles Fostex aux membranes en carton mâché et au spectre tout tordu, c'est un véritable bond en avant qui s'est offert à moi et à mes activités professionnelles. Car les PMCs sont vraiment des enceintes particulières dans leur construction et leur rendu, à vrai dire elles sont le prolongement de la marque, c'est à dire très haut de gamme, en bonne place parmi le fer de lance du Monitoring audio sans compromis, et qui a maintes fois fait preuve d'audace dans la conception de ses produits alors que les grandes marques peinent un peu à se renouveler. 


Ils se la pètent, mais ils ont le droit.

Appliqué à la fois dans le Monitoring et la Haute Fidélité (très) haut de gamme, PMC a par le passé sorti des modèles d'exception qui ont fait référence, à l'image des incroyables BB5X, des gigantesque enceintes 7voies, que j'ai eu la chance d'écouter à plusieurs reprises au Studio de mastering Electric City en compagnie d'Alan Ward, même si le bougre écoutait ses sources avec un niveau semblable au démarrage d'une fusée ou à l'atterissage d'un porte-avion en chute libre, dur! Si la technologie d'une enceinte est toujours la même depuis des dizaines d'années, ce sont les matériaus employés (bois, membranes, suspensions) et la conception du coffrage qui retiennent toute l'attention des ingénieurs anglais, et chez PMC, et bien c'est... particulier. Un petit historique s'impose, car oui, c'est qu'elles ont une histoire ces enceintes, riches d'un background technique et conceptuel de 12ans! 
 BB5 XBD-A, probablement une des enceintes les plus terribles de l'univers de la mort qui tue sa reum'


Le premier modèle sorti en 2001, sobrement nommé TB2 (Tiny Box) est une enceinte passive 2 voies alors destinée aux petites cabines, et aux budgets plus restreints, et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle a fait date! Le genre d'enceintes dont parlent avec nostalgie les vieux baroudeurs des studios, qui ont apprécié l'exceptionnelle tenue en fréquence, la restitution des transitoires et la puissance délivrée par ces enceintes, qui dans la plupart des cas étaient associées à un ampli Bryston 2x120w, marque très proche de la firme anglaise, connue pour ses étages d'amplification de très haut niveau. La technologie ATL, "Acoustic Transmission Line", présente sur toute la gamme du constructeur, est naturellement au coeur de ces vénérables TB2... et ce précieux brevet, c'est un peu le bébé de PMC, une technologie dont le groupe anglais se garde bien de dévoiler tous les secrets, car elle est garante de son statut d'exception au sein du marché. Alors concrètement c'est quoi? Et bien, c'est un peu comme les labyrinthes acoustiques parfois utilisés dans le Bass Reflex, sauf qu'au lieu de gonfler artificiellement le grave, l'ATL va le "charger"... Le but étant de le mettre parfaitement en phase avec le reste du spectre, en évitant la moindre trace de distorsion et d'irrégularité fréquentielle. Physiquement, on a donc affaire à une "ligne" d'air interne au coffrage, souvent avec très peu de virages, et tapissée d'un mousse haute densité destinée à épurer le signal basse fréquence de ses "traînages" et autres résonnances. Le tout pour arriver à ce que le constructeur apelle une "Drive unit" de basses fréquences. Le résultat, un spectre hyper étendu par rapport à la taille du diffuseur, un rendu transitoire chirurgical et une distorsion proche du zéro, pour un punch spectaculaire et garanti 0% coloration dans tout le tiers inférieur du spectre. Bref, une petite révolution à l'époque.


La famille 2005, TB2SA et les petites soeurs, DB1SA, toutes aussi canons!

2005 arrive, et il est temps de renouveler l'entrée de gamme de chez PMC, les TB2 vont alors se transformer en enceintes actives, les TB2S-A chacune affublée d'un ampli de chez Flying Mole. Mais décidément la marque ne fait jamais comme tout le monde, et plutôt que d'affubler à chaque enceinte un filtrage actif où 2 amplis de classe AB prendront le relai après la fréquence de coupure "crossover", l'architecture demeure celle d'une enceinte avec filtrage passif, autrement dit post-amplification, en classe... D !!! L'amplificateur, du haut de ses 100 watts, traite donc le signal dans son entièreté, avant d'attaquer le filtrage, dont les composants ont été revus pour l'occasion. Cet ampli est donc entièrement découplé du coffrage et situé à l'arrière de celui-ci... d'une taille très modeste et garni d'un ingénieux relai de dissipateurs thermiques, il n'encombre pas trop le volume global du produit, qui demeure passe-partout. le signal attaque l'ampli via prise XLR, dont la sortie est reliée à l'enceinte via une fiche Speakon 4 de chez Neutrik, de la bonne came donc. Et ce changement radical, et bien il a eu ses adorateurs, et ses détracteurs, qui regrettaient amèrement leur bon vieux ampli Bryston, lequel était capable de délivrer bien plus de jus que son nouvel homologue double mono en classe D. Si je n'ai pu vérifier la chose par moi-même, tout le monde s'accordait néanmoins à dire que hormis l'amplification, les quelques améliorations apportées à l'enceinte étaient bénéfiques... nouveau Tweeter soft dome, filtrage et crossover remaniés, architecture interne légèrement changée, PMC progressait encore dans l'excellence de sa restitution. Reste que cette série a quelque peu souffert de la réputation de ses amplificateurs, qui ont connu un taux de retour SAV plus élevé que la normale.

Le fameux ampli flying Mole...


2010 !!! Flying Mole a déposé le bilan, et PMC cherche un nouveau partenaire pour concevoir l'ampli qui allait avoir l'honneur d'alimenter la nouvelle mouture de son fleuron near-field. Mais les anglais soint pointilleux, et n'essuient que des déceptions par rapport aux idées proposées par leurs collaborateurs. Qu'à cela ne tienne, ils allaient désormais devenir concurrents! PMC décide de prendre en charge la conception et l'assemblage de son nouvel ampli, dont il reprendra les bases de son prédécesseur signé Flying Mole. Design et modularité identiques donc, classe D toujours, sauf que la puissance double pour aller sur une nominale de 200Watts!!! Ceux qui regrettaient le Bryston vont en prendre pour leur grade affirme PMC, qui profite de cette 2ème actualisation pour opérer quelques autres changements discrets dans l'électronique plus haut de gamme du filtrage, crossover, et encore une fois quelques ajustements de matériaus et de design. La facture s'alourdit et les désormais nommées TB2S-AII ne sont plus si proches de l'entrée de gamme comme ce fût le cas en 2001... Bon, voilà, maintenant on peut passer à l'objet en question! 
 

Je ne vais pas faire dans la redite, car ce cru 2011 reprend la même architecture que ses soeurs aînées, donc ampli à l'arrière, pas d'évent, dissipateurs thermiques, tweeter papier (donc fragile), boomer 5", et un bien joli coffre... Le bois est d'excellente qualité, très lourd, il est traîté avec un revêtement haute densité de plastique très doux, le switch on/off ainsi que le volume sont disposés au sommet arrière de l'enceinte, pratique. le tout respire la qualité (et son poids!), une simple caresse transmet une singulière sensation de haut de gamme. Petit détail que je n'ai pas précisé, ces amplis situés à l'arrière sont disponibles à la vente séparément. De quoi actualiser une vieille paire de 2001, ou dépanner sérieusement si un des amplis rencontre un problème, éventualité assez indésirable.


 I'm sexy and I know it

Et alors, à l'écoute ça donne quoi? Et bien pour ma part le constat est simple, à ce tarif, je n'ai absolument rien à redire concernant cette enceinte, tous les critères auxquels j'attache de l'importance sont infiniment respectés, le bonus étant les nombreuses petites surprises qu'elles ont été à même de me fournir généreusement. Tout d'abord, l'image stéréo est impeccable, le moindre mouvement panoramique est discernable, et on a la délicieuse perception d'un véritable centre, comme une enceinte centrale virtuelle qui fait vraiment bloc de plein front. Ensuite, le sweet spot est très généreux en largeur, mais également en hauteur! Chose assez surprenante pour du near/mid-field, habituellement si directif... Idem pour la dynamique et le volume sonore délivré, c'est du très très lourd, le test incontournable du Boléro de Ravel s'en tire avec tous les honneurs, des débuts chuchotants et une fin explosive où on est scotché par la puissance de sortie de l'ampli, qui semble faire fi de toute distorsion malvenue, ces enceintes ont une patate incroyable. Concernant la tenue en fréquence, c'est une véritable autoroute bien goudronnée et sans la moindre aspérité discernable à l'écoute, on a un aigu riche de détails sans la moindre pointe d'agressivité, un medium plein et généreux, et des superbes basses en guise de cerise sur le gâteau, d'un volume incroyable pour cette taille de coffrage modeste, les infras se dévoilent dès 40Hz au moindre toucher de contrebasse, une véritable bénédiction.

Mais ce spectre fréquentiel, si droit soit-il, n'est que le plateau d'argent qui nous sert le véritable plat principal de PMC: la tenue transitoire. Et là, putain c'est la claque... Sur l'entiereté de la plage fréquentielle, on a droit à une définition tout bonnement stupéfiante, sans que rien ne bave, sans que rien n'agresse outrageusement. La relecture d'un gros disque de Rock surproduit est une redécouverte singulière, les gros coups de caisse claire forment des pics d'énergie dès les 200Hz, les Kicks n'encombrent plus que leur espace dédié, les murs de cordes puisent leur puissance de l'infra jusqu'au souffle analogique des amplis. Bref, on a une réelle sensation d'attaque chirurgicale où le moindre petit pic de la forme d'onde est traduit par des vibrations dans l'air... Cette tenue dans les transitoires est également gage de précision accrue et le contrôle des micro-informations contenu dans le signal en jouit totalement, montées de souffle, queues de reverb, grésillements des instrus électriques, overdubs, pistes superposées, absolument rien n'échappe à ces bêtes noires, qui vont de par leur manque total de coloration sérieusement malmener vos acquis et qui n'ont pas leur pareil pour révèler tous les défauts d'un mixage qui passait alors sans encombres sur des systèmes moins puissants. Bref, la technologie de mise en phase via l'ATL fait des merveilles, et offre un niveau de performances qui est normalement l'apanage de gammes bien supérieures. C'est vraiment le terme de "mise en phase" qui en met plein les oreilles ici et dont l'appelation est parfaitement justifiée, tant chaque attaque d'instrument, chaque note percussive trouve sa place dans le spectre sans traîner, sans que plus rien ne se chevauche. Le plus incroyable, c'est que cette puissance, cette tenue transitoire et fréquentielle, elle est constante quel que soit le niveau d'écoute... Là où j'avais tendance à pousser mes potars lors d'une relecture importante, j'ai désormais l'esprit plus tranquille, et les oreilles qui sifflent moins. S'il n'y avait qu'un mot à retenir des DB2A, ce serait ANALYTIQUE.





Vous l'aurez compris, pour écouter de la musique c'est carrément fendard. Et pour le boulot alors? Et bien tout naturellement voici une arme redoutable pour trifouiller de l'EQ paramétrique, les composantes indésirables d'une voix apparaissent sans effort, pops, plausives, sifflantes, bulles et respirations polluées... on passe du coup beaucoup plus de temps à les nettoyer! Le prix à payer face à tant de précision, c'est que l'on devient du coup un peu maniaque... J'ai noté également un bien meilleur travail effectué sur les effets temporels, il m'est désormais beaucoup plus aisé de faire la différence entre 2 reverbs d'apparence assez similaire et mes travaux en post-production en ont largement profité, déterminer l'empreinte acoustique d'un lieu, qu'il soit domestique ou naturel, n'a jamais été aussi facile. Et de par leur dynamique étendue, mon ressenti et mon expérience s'est nettement améliorée face à la gestion du Loudness, où j'ai vraiment de plus en plus tendance à relever mes seuils de compression pour laisser les voix s'exprimer avec moins de retenue, quitte à aller chatouiller les -3dBFS. De toute manière, avec des transitoires que l'on ressent nettement à l'écoute, et un peak-mètre plasma de précision, je n'ai plus aucune excuse de ne pas me laisser aller aux joies de la dynamique décomplexée! On décompresse, on lève le pied, et mesdames PMC prennent soin de vous fournir une alerte sonore équivoque au moindre faux pas. La largeur du sweet spot plaira au client, qui n'éprouvera plus le besoin de vous coller au cul au centre de la pièce, et l'excellente tenue de l'enceinte même à des faibles niveaux d'écoute, vous épargnera des maux de tête carabinés, travailler 10h par jour devant ces jolies monolithes ne pose aucun problèmes de fatigue auditive. Et mes CMS40 alors? Et bien elles sont reléguées au stade d'écoute secondaire de contrôle, mais demeurent réellement précieuses pour un travail de précision où le grave n'a pas à intervenir (restaurationn audio entre autres!), bien que plus agressives elles n'ont pas à rougir face aux PMC dans le domaine de l'aigu, quant au reste du spectre, il n'y a évidemment pas photo, la taille du baffle donne inévitablement lieu à un medium bien plus étriqué, et un grave qui semble du coup inexistant. Cela dit, elles demeurent indispensables à mes habitudes, j'ai ENFIN un tandem de choc qui ne peut donner lieu à aucune mauvaise surprise.

Bon, bah voilà quoi... en même temps, c'est du 3000 boules la paire... (mais pas en occasion!) et si on a la certitude avant même l'écoute de passer à la vitesse supérieure, c'est réellement gratifiant de découvrir au fil des semaines ces petites surprises auxquelles on ne s'attendait pas forcément. Pour ma part ces "petites" PMC feront partie de ces enceintes qui bousculent les choses pour les remettre dans le droit chemin, le genre d'étape à partir de laquelle tout retour en arrière est strictement inenvisageable. Pour la taille de ma pièce c'est tout simplement parfait, même si l'acoustique gagnerait à faire un level-up, et je ne vois pas l'intérêt de monter en gamme au sein de mes activités actuelles. Les modèles du dessus chez PMC, soit les AML1, sont encore plus impressionnantes, mais elles sont vraiment analytiques à l'extrême, et pour le coup, la découverte est choquante, comme j'ai pu en faire les frais dans le studio de mixage du groupe Deus (bon ok ils étaient pas là, c'était juste pour me la péter un peu), bref, le genre de produits qui a sa place en cellule de mastering, et pas grand intérêt ailleurs... Concernant les concurrentes directes, à vrai dire elles sont plutôt rares, et c'est du côté de marques plus exotiques comme Klinger Favre que l'on pourrait trouver une équivalence, à mon sens les véritables prétendantes au trône sont les Event Opal, aussi moches qu'excellentes, ou encore les Klein & Hummel 300, modèles 3 voies un peu plus chères qui sont également de très haute volée. Non vraiment, pour envisager un bond qualicatif, c'est peut-être du côté des incroyables Focal SM9 qu'il faudrait voir... mais pour un tarif presque doublé!


Event Opal, design fail ???

Bref, je crois que ces PMC TB2A-SII font tout simplement partie des meilleures enceintes disponibles sur le marché, et je compte bien en profiter durant de lonnnnngues années! Si seulement je pouvais ne plus travailler ailleurs sur des Genelecs... :/

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