mercredi 4 juin 2014

Les jumelles s'en mêlent - test des TWIN6 BE de chez Focal

Il est des grosses boites que l'on croise souvent, que ce soit sur divers lieux de travail, chez de simples passionnés ou parmi les galeries de photos de studio qui font rêver de par le monde. Les Focal Twin6 font partie de ces formes familières que l'on ne fait parfois que dévorer de l'oeil avec convoitise... Grand bien m'en fasse, j'en ai désormais une (grosse) paire depuis quelques 10 mois, l'instant est donc opportun pour livrer ces joujous de bois devant le tribunal de l'écoute et de l'analyse à peu près objective. A l'heure où les toutes nouvelles SM9 s'affichent comme une nouvelle référence dans la catégorie des 3 voies de mi-proximité, que reste-t-il à ces ancêtres de 2006 ???


Design intemporel.



Le premier contact est visuel, et l'habillage d'acajou vient nous rappeler que ces braves petites affichent déjà une dizaine d'années au compteur! Lourdeur manifeste et symptomatique des modèles 3 voies, la Focal affiche 20 kilos pièce (ce qui nous fait 75Euros du Kilo, à peine moins cher qu'un bon foie gras périgourdin), un premier contact à bras le corps assez rassurant donc, qui vient nous rappeler qu'un bon coffrage et une électronique solide, ça doit être lourd. La finition des bois est impeccable, presque luxueuse, tout comme l'assemblage de l'ensemble, à toute épreuve, rien ne bouge et la grosse plaque de métal venant orner le cul de la machine parachève la robustesse du monolithe. Les HPs sont solidement fichés dans une couronne semblable à de la roche très dure, elle-même vissée sur 6 points, tandis que le tweeter s'ancre dans une jolie plaque d'aluminium. Bref, on est pas dans du premier prix, c'est un fait. Là où le poids des ans peut se ressentir, c'est par rapport aux alliages utilisés pour la confection des HPs... Appelé au catalogue matériau composite, c’est surtout du carton, du papier, et du caoutchouc en guise d'amortisseur de membrane. C'est donc le grand grand classique de la construction d'enceinte depuis bien longtemps, mais ça n'est plus vraiment le cas de nos jours où des matériaux plus exotiques semblent prévaloir, parfois dans des critères esthétiques, parfois pour améliorer le facteur d'amortissement de membrane et sa distorsion naturelle. Bref, ça faisait assez longtemps en fait que je n'avais plus mis la main sur des enceintes construites ainsi, moins modernes dans la conception certes, mais en aucun cas inférieures à ses homologues plus récentes, n'oublions pas que les fibres de papier/carton, de par leur légèreté, sont garantes d'une tenue transitoire de haut vol. Le tout, c'est de ne pas leur donner de coup ou de laisser votre chat faire ses griffes dessus, sinon bonjour l'embrouille... L'absence de grille de protection rendent ces deux rondelles d'autant plus vulnérables. Tout aussi fragile mais bien ancré dans l'esprit de la marque jusqu'à nos jours, le tweeter à dôme inversé porte fièrement son étiquette Beryllium, métal rare et coûteux auquel Focal accorde un intérêt particulier pour ses qualités de diffusion.



 Chez moi !


Autre prix de l'ancienneté, le rôdage. Si certains modèles actuels pourraient presque s'en passer (certaines références travaillant en classe D notamment), sa nécessité est ici indiscutable, la faute sans doute aux matériaux fragiles utilisés, et n'espérez pas avoir le coup de foudre dés les premières écoutes, tant le comportement de l'enceinte est aléatoire durant cette période, l'écoute de mes premières voix fût une horreur, le tweeter délivrant un son métallique assez affreux. Donnez leur donc du nectar pendant de nombreuses heures... jazz nocturne, musique de chambre, puis électro minimaliste et autres sources de rock pour éveiller les attaques d’ampli, tout en douceur, sous peine de leur faire vraiment du mal. Au fil des jours, les grosses mémères se dévoilent malgré tout avec un naturel confondant, les transitoires se réveillent et le bas du spectre commence à bomber le torse. Pas de doute, on est sur de la 3 voies... le bas-medium jouit de cette générosité qui manque aux modèles de monitors de taille plus restreinte. Les deux woofers travaillent de concert pour préserver une échelle dynamique vraiment béton quel que soit le niveau sonore, et c'est une véritable réussite, la dynamique ne peine jamais et cette Twin6 marque bien des points comparé à certaines gammes équivalentes. Un woofer travaille en large bande, tandis que l'autre s'occupe du 40-150Hz, il est d'ailleurs possible de choisir lequel des deux prend en charge le bas du spectre via un switch à l'arrière du chassis, aucun problème vis-à-vis du placement et du sweet-spot donc, bonne idée! Après quelques tests, la meilleure disposition d'écoute selon moi demeure le positionnement horizontal avec les woofers dédiés aux basses sur l'extérieur, l'image est homogène avec la sensation d'un vrai centre et surtout une image stéréo d'une précision chirurgicale. L’amplification est richement dimensionnée et permet à l’enceinte de s’exprimer dés 40Hz avec une réserve en puissance qui permet de bosser bien à l’ombre de toute distorsion. Développée autour de la technologie Bash autour du grave/medium via un relai de 2 amplis de 150wattsRMS chacun, l’image sonore tient toutes ses promesses jusqu’à 1kHz, le bas du spectre est vraiment superbe et rien ne semble traîner, un régal pour l’écoute de Cds! Focal affirme que ce dispositif permet de disposer d’une qualité d’amplification AB conjointement au rendement qualitatif propre à la classe D. Soit, j’aurais aimé en savoir plus d’un point de vue électronique (c’est pas faute d’avoir cherché), mais le fait est là, ça marche très bien, tant pis pour les maths. Au delà du kilo de Hertzs, un ampli classe AB de 100WRMS prend le relai, largement efficient pour la partie du spectre la moins énergivore.


Allah verticale ça peut le faire aussi.


Et la suite? Et bien je dois bien avouer que je n'ai plus rien à ajouter... Si je vante tout autant les mérites des gammes de chez PMC, PSI ou Klinger Favre, ce sont quand même des enceintes particulières dont le caractère résolument analytique peut demander un moment d'adaptation non-négligeable. Avec ces Twin6be, je me suis retrouvé dés les premiers mixages en terrain familier... Peut-être est-ce dû au fait que je suis déjà habitué aux gammes CMS et autres colonnes hifi de la marque, mais j'y ai retrouvé tout ce que j'apprécie chez ce constructeur, et je n'ai fourni aucun effort d'appréhension dans le cadre de mes travaux TV/cinéma. Cette paire chiffrée à 3000euros s'oublie presque instinctivement et la réponse en fréquence ne laisse aucun point d'ombre possible dés lors que l'on maîtrise bien ses outils. Certains pourront peut-être lui reprocher une certaine forme d'austérité musicale ou son caractère un peu "montant" dans le haut-medium (flagrant sur des instruments saturés), mais en aucun cas ses caractéristiques fréquentielles et dynamiques ne peuvent faire l'objet de reproches formels... Pour qui a l'habitude de bosser sur de la 2 voies de proximité et veut monter en gamme, la Twin6be fait sans aucun doute figure de plus-value réelle, et incarne peut-être bien le choix de la sagesse comparé aux modèles équivalents de chez Adam par exemple, pour lesquels j'ai bien plus de doutes à formuler. Je ne les utilise que dans le cadre de la post-production, mais je n'ai aucune réserve quant à leur exploitation musicale, qu'elle soit professionnelle ou domestique. On peut d'ailleurs rêver d'un ensemble multi-canal basé sur ces beaux coffres, l'adjonction avec les Solo6 et un bon vieux Sub doit forcément àtre miraculeuse. Bon, et puisqu'il faut quand même relever un point noir, en voici un: malgré les dires du constructeur, ces enceintes semblent ne pas être blindées magnétiquement! Autrement dit, éloignez vos iPhone et autres chinoiseries (bizarrement mon htc ne leur provoque rien du tout), voici l'élément déplaisant assez symptomatique d'une enceinte qui commence à afficher son ancienneté... Dommage que Focal n'ait pas jugé nécessaire de faire un petit effort à cet égard, qui fâchera les plus connectés des réalisateurs. (Comment ça ils le sont tous??)




Pour résumer: des enceintes qui manquent de fun, mais un outil de travail rassurant qui ne laisse rien au hasard.